ROMEO MIVEKANNIN
CORRESPONDANCES

ANTANANARIVO
2 OCTOBRE 2025 AU 21 MARS 2026

La Fondation H accueille Correspondances, une exposition personnelle de Roméo Mivekannin du 2 octobre 2025 au 21 mars 2026. L’artiste franco-béninois, invité à produire une exposition en dialogue avec l’histoire, le territoire et la culture malgache, interroge les récits historiques, les représentations coloniales et les transmissions spirituelles dans le contexte local. Cette exposition occupera pendant 5 mois les espaces d’exposition supérieurs de la Fondation H à Antananarivo, Madagascar.

Le titre Correspondances s’impose comme une clé de lecture essentielle de l’exposition personnelle de Roméo Mivekannin à la Fondation H . L’artiste, pour ce projet, s’est intéressé aux cartes postales coloniales, supports à la fois intimes et idéologiques, qu’il réinterprète par la peinture textile dans une démarche de réappropriation critique. Le terme Correspondances désigne aussi les échos entre temporalités, récits et gestes de réparation, et s’étend aux circulations géographiques entre France, Bénin et Madagascar – entre les passés coloniaux et les résistances contemporaines, entre les figures effacées et leur réinscription dans une mémoire active. L’exposition devient ainsi le lieu d’un dialogue entre les récits, les mémoires et les gestes de réparation. Correspondances incarne un tissage à plusieurs voix/regards/mains : entre archives et créations, entre continents et insularités, entre gestes d’artistes et gestes d’artisanes, entre disparus et vivants.

Pour cette exposition, l’artiste présente deux séries d’œuvres. La première œuvre, Fahatsiarovana, se présente sous la forme d’une installation monumentale de 20 mètres de long, réalisée en collaboration avec des artisans ferronniers malgaches. Celle-ci représente des asen, autels portatifs vaudous, en résonance avec les reliques et stèles funéraires malgaches.La seconde série d’œuvres textiles est composée de peintures sur draps cousus, infusés d’élixir qu’il compose lui-même, inspirées de cartes postales coloniales, réhaussées de broderies réalisées par des artisanes malgaches. Les œuvres exposées – toutes inédites – sont produites entre son atelier à Toulouse et Antananarivo, en mobilisant le savoir-faire artisanal local.

La Fondation H organise par ailleurs tout au long de l’année une série d’événements et d’activités pour le grand public. Tous les samedis de 14h à 16h, la Fondation H accueille des événements publics, dont des conférences, des ateliers, des performances et des projections. Des visites et ateliers sur mesure sont organisés sur rendez-vous pour des publics spécifiques, notamment pour les enfants de 6 à 14 ans (par le biais de partenariats avec des écoles publiques et organismes d’aide à l’enfance). Divers dispositifs de médiation sont également mis en place pour s’adapter aux publics en situation de handicap : des visites accessibles en langue des signes malgache ou sous forme adaptée à différents types de handicaps physiques et mentaux, en collaboration avec les ONG partenaires.

BIOGRAPHIE DE L'ARTISTE

Né en 1986 à Bouaké (Côte d’Ivoire), Roméo Mivekannin vit et travaille entre Toulouse (France) et Cotonou (Bénin).

Après une formation en ébénisterie puis des études d’Histoire de l’art, Roméo Mivekannin choisit d’intégrer l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Toulouse. Parallèlement à ses études, il développe un travail personnel de création plastique, et expérimente plusieurs médiums, de la sculpture à la peinture. À la suite de ses études, il se consacre à son activité de plasticien tout en commençant une thèse entre histoire de l’art, sociologie et architecture.

Au croisement de la tradition héritée et du monde contemporain, Roméo Mivekannin intègre ses créations au sein d’une temporalité ancestrale, fabriquant ses propres rituels, en écho à la cosmologie vaudou, très présente au Bénin. Entre peinture, sculpture et installation, son univers est pluridisciplinaire et ambitieux. L’artiste joue avec les matières et cherche à bousculer les frontières établies entre les disciplines, afin d’opérer tant formellement que symboliquement un acte d’effraction qui lui est propre.

Avec force et subtilité, l’artiste défait chaque fois un peu plus les fils de nos enfermements, et interroge ainsi nos héritages, collectifs et intimes. Les œuvres de l’artiste proposent une forme de stratégie de résistance qui mêle l’émotion au regard critique.

Portrait de Roméo Mivekannin © Fondation H
Fahatsiarovana [Memorial], 2025

Installation monumentale de vingt mètres de long, Fahatsiarovana se compose d’une structure métallique et de soixante asens — autels portatifs vodous servant à communiquer avec les ancêtres — réalisés en collaboration avec l’atelier de ferronnerie de Finoana Ratovo à Antananarivo.

Ces sculptures verticales entrent en résonance avec certaines traditions funéraires malgaches : elles forment un axe reliant la terre au ciel, vivants, morts et divinités, matérialisant un langage cosmique entre visible et invisible, mémoire et oubli. Inspirée d’un rêve de l’artiste et conçue comme un contre-rituel, l’œuvre réinscrit dans l’espace d’exposition des présences occultées par la colonisation et l’évangélisation.

Par son caractère rituel et monumental, Fahatsiarovana propose aux visiteurs une traversée initiatique, une expérience de mémoire et de réparation poétique.  

Il s’agit d’un hommage aux personnes disparues, à nos disparus, aux ancêtres. Tissant le lien entre Madagascar, lieu paradigmatique du va-et-vient de cultures venues d’Asie, d’Europe et d’Afrique, et le continent africain, cette œuvre parle du départ et du retour, de l’art de rendre de nouveau présent·es cell·eux qui sont déjà parti·es.
Roméo Mivekannin

La Fondation H tient à remercier Finoana Ratovo et les ferronier·ère.s de son atelier ayant participé à la réalisation de cette œuvre : José Radrianantenaina, Alain Jérémie Randrianasolo, Mahefasoa Christophe Rakotomamonjy, Georges Honoré Manolisoa, Claris Solofondrahety, Patrick Solofonjatovo, Solondrazany Mahaliny, Fanomezantsoa Christine Rahariniaina, Isabelle Masy.

Série de cartes postales

Roméo Mivekannin réalise une série d’œuvres textiles inspirées de cartes postales coloniales, souvent banales en apparence mais profondément violentes, emblème d’un imaginaire raciste. Ces images, massivement diffusées à la période coloniale, participent à la construction d’un récit : elles imposent des stéréotypes figés, érotisent les corps féminins et érigent une hiérarchie des cultures.

En substituant son propre visage à ceux d’origine — geste récurrent dans sa pratique —, l’artiste renverse la logique de dépersonnalisation et inscrit une présence active dans ces archives visuelles. Ce geste devient un acte de mémoire, une réécriture et une réparation : il détourne l’archive coloniale pour lui conférer une autre fonction, celle d’un hommage rendu aux figures anonymes qui les arrache à l’oubli et les réinscrit dans une histoire partagée.  

Réalisées à partir de draps usagés, imprégnés d’un élixir préparé par l’artiste, ces œuvres ont été augmentées de broderies par la brodeuse Harivololona Rasamison, à Antananarivo. Ce processus collectif instaure une co-écriture où se rencontrent regards et savoir-faire.

Sous un aspect anodin, les cartes postales sont des archives qui documentent la construction et la diffusion à grande échelle d’un récit colonial fait d’images archétypales et racistes. Souvent elles sont doublées de commentaires, de messages, envoyés par des individus vivant dans les colonies vers des amis, de la famille, situés en métropole. La catégorisation des cultures et l’érotisation des corps féminins véhiculées par les cartes postales ont contribué à façonner un regard qui perdure encore aujourd’hui sous différentes formes.
Roméo Mivekannin

La Fondation H tient à remercier Madame Harivololona Rasamison pour son travail de broderie sur les œuvres de cette série.